samedi 14 janvier 2017

La musique argentine en deuil : Horacio Guarany est décédé [Actu]

"Le folklore pur sucre", titre le supplément culturel de Página/12

Il était né à Las Garzas, petite agglomération rurale de la province de Santa Fe, le 15 mai 1925. A l'automne, il aurait eu 92 ans. Depuis plusieurs années, même s'il continuait à se produire, il avait accumulé les alertes de santé et hier matin, à l'aube, son cœur a lâché, dans sa maison de Luján, dans la province de Buenos Aires. On l'avait surnommé el Potro, le poulain, sans doute pour son caractère rebelle, bien trempé et ses origines authentiquement rurales.

Une grande émotion s'est répandue dans tout le pays dès que son agent a communiqué la nouvelle.

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qui privilégierait l'Argentine en Amérique du Sud
Horacio Guarany a doit à la manchette de gauche

Horacio Guarany était un chanteur à la voix chaude et grave, il était aussi un compositeur et un auteur. Il a formidablement enrichi le patrimoine de la chanson nationale. Il avait commencé sa carrière en 1957 et avait enregistré 57 albums dans lesquels il avait exploré presque tous les genres et les rythmes du folklore argentin. Sur scène, il ne dédaignait pas non plus le tango, qu'il interprétait d'une manière très différente des chanteurs urbains et citadins que sont les tangueros traditionnels mais ça n'en était pas moins excellent... L'artiste n'avait pas de site Internet propre (il en existe un, animé par des fans). Pour le cinéma, il avait composé mais il avait aussi joué. C'est ainsi qu'il incarna en 1974 le gaucho Martín Fierro dans La Vuelta de Martín Fierro, l'adaptation à l'écran du second volet de l'épopée, qui sortit pour le centenaire de l'œuvre de José Hernández. Mais cette même année, il dut quitter le pays pour un exil de quatre ans.

Au début de la guerre froide, doté d'une sensibilité sociale forte, Horacio Guarany avait pris sa carte au parti communiste argentin, ce qui devait lui valoir de nombreux déboires dans les terribles années 1970, avant même le coup d'Etat de Videla, en mars 1976. La Triple A, la milice anti-communiste fondée par Isabel Perón, voulait sa tête et le manqua de peu. Il fut contraint à l'exil. Lorsqu'il osa rentrer en 1978, deux ans après l'arrivée au pouvoir des affreux galonnés, il subit la censure de ses chansons (il n'était pas le seul). Encore une fois, il survécut à un attentat contre sa vie mais il resta au pays, en dépit du danger. Depuis le retour de la démocratie, son talent était reconnu par tous. Il était invité de toutes parts, il était de tous les festivals. En mai dernier, il avait présenté son autobiographie à La Feria del Libro de Buenos Aires. Il avait reçu quinze disques d'or, le prix Gardel et le Konex de platine comme meilleur interprète masculin de folklore.

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Les réseaux sociaux se sont remplis dès l'annonce de la nouvelle d'hommages de la part de tous les musiciens du pays et au festival de Jesús María, dans la province de Córdoba, une fête de la musique et du rodéo (doma), a fait hier une minute de silence et posté un communiqué sur sa page Facebook. Guarany avait été longtemps l'une de ses figures de proue.

Pour aller plus loin :
lire l'article de La Nación, qui a aussi réédité la dernière interview du musicien
lire l'article de Radio Nacional, dont les animateurs ressortent les archives aujourd'hui et les mettent en ligne.